22 Nov 2024
Posté le dans CSE en actu, Décryptage, Non classé, Santé et Conditions de travail
Depuis 1999, le 25 novembre marque la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, lancée par l’ONU. Cette date donne également le coup d’envoi de 16 jours d’activisme contre la violence basée sur le genre, qui se concluent le 10 décembre avec la Journée des droits humains. Mais où en est-on en 2024 ? Pourquoi ce sujet reste-t-il un enjeu au sein du monde professionnel en France ? Que peuvent faire les entreprises et les représentants du personnel (IRP) pour agir ?
Violences sexuelles et sexistes : une réalité encore prégnante dans le monde professionnel
L’actualité et les dernières études le montrent : les agissements sexistes et les violences sexuelles persistent au quotidien et touchent majoritairement les femmes. Si le cadre privé reste souvent le premier lieu où elles se manifestent, le monde du travail n’en est pas épargné.
Selon l’enquête Genese (2021), 4 femmes sur 10 déclarent avoir été victimes de Violences sexistes et sexuelles (VSS) au travail, contre 15 % des hommes. Ces chiffres témoignent de comportements qui entravent l’égalité professionnelle.
Les conséquences sont lourdes :
- 37 % des femmes affirment avoir subi des discriminations sexistes dans leurs choix de carrière.
- 9 femmes sur 10 anticipent des comportements sexistes et adaptent leur attitude pour les éviter.
- 35 % des femmes actives n’osent pas demander de promotion ou d’augmentation, une proportion qui grimpe à 44 % parmi les catégories socioprofessionnelles les moins favorisées.
- La peur du harcèlement ou de ne pas trouver leur place pousse 15 % des femmes à renoncer à certaines filières, notamment scientifiques.
Sexisme et violences : l’ombre persistante des secteurs dits masculins
Les travaux de l’INRS et de la DARES révèlent une réalité préoccupante : dans les secteurs professionnels dominés par les hommes, comme l’industrie, les femmes subissent davantage de comportements hostiles à caractère sexiste. Ces comportements incluent des propos obscènes ou dégradants, auxquels 3,6 % des femmes sont exposées, contre 2,4 % des hommes. Les propositions à caractère sexuel, bien que moins fréquentes, concernent 0,5 % des femmes, contre 0,4 % des hommes, sur les 12 derniers mois.
Le rapport 2024 de la mission interministérielle sur les violences sexistes et sexuelles confirme que la relation d’autorité aggrave ces actes. Lorsque l’auteur détient une position de pouvoir, l’impact sur la victime se trouve amplifié.
Face à cette problématique structurelle, les partenaires sociaux ont un rôle clé. Ils doivent impérativement inscrire la lutte contre les violences sexistes et sexuelles à l’agenda des négociations, afin de limiter ces inégalités à long terme. Le Haut Conseil à l’Égalité (HCE) préconise d’ailleurs cette approche dans ses dernières recommandations.
Des outils légaux pour prévenir et agir
Le législateur a mis en place une série de dispositifs visant à protéger la santé et la sécurité des salariés tout en assurant une égalité de traitement. Ces mesures clés permettent de lutter efficacement contre les violences sexistes et sexuelles au travail :
- Évaluation annuelle des risques :
- L’employeur doit élaborer chaque année un document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP).
- Il doit également présenter un plan d’action pour la prévention des risques (Papripact), en incluant les situations de travail et les risques liés aux VSS.
- Prise en compte des évolutions des conditions de travail :
- Lors de tout projet modifiant les conditions de travail, l’employeur doit évaluer les risques associés, y compris ceux liés aux VSS.
- Égalité et non-discrimination :
- Les mesures légales exigent que les politiques de l’entreprise garantissent une égalité de traitement entre hommes et femmes. Ces actions visent à créer un environnement professionnel sans comportements hostiles.
- Articulation égalité professionnelle et QVCT :
- Depuis 2017, l’égalité professionnelle et la qualité de vie et des conditions de travail (QVCT) sont regroupées dans un même bloc de négociation. Cette organisation facilite l’intégration des actions contre les VSS dans le dialogue social.
- Création de référents Harcèlement Sexuel et Agissements Sexistes :
- Mis en place en 2018 pour l’employeur et le CSE, ces référents assurent des missions de sensibilisation et d’accompagnement des salariés. Cependant, leurs moyens restent souvent limités, ce qui peut réduire leur impact.
Les baromètres récents, notamment ceux d’Ekilibre et #StOpE, montrent que ces dispositifs favorisent une baisse des comportements sexistes. La sensibilisation, en particulier, s’avère un levier puissant pour prévenir les VSS. Cependant, il est crucial de maintenir et de renforcer ces efforts pour garantir un environnement de travail sûr et égalitaire.
Les IRP : des acteurs essentiels dans la lutte contre les violences
Les employeurs, garants de la santé et de la sécurité des salariés, doivent prévenir les risques et mettre en place des actions concrètes. Les représentants du personnel (IRP) doivent aussi prendre une part active à cette lutte. Leur rôle repose sur plusieurs leviers :
- Se former pour comprendre les mécanismes des VSS et leurs impacts.
- Informer les salariés et communiquer sur les moyens d’action existants.
- Négocier des dispositifs concrets pour prévenir et traiter les VSS.
- Utiliser les consultations obligatoires : intégrer les risques liés aux VSS dans les analyses des DUERP et Papripact.
L’expert du CSE joue un rôle stratégique : il intervient pour établir un diagnostic précis lors des consultations sur la politique sociale ou dans le cadre de projets d’envergure. En parallèle, il accompagne les organisations syndicales dans la préparation des négociations sur l’égalité professionnelle et la qualité de vie et des conditions de travail (QVCT), en veillant à intégrer pleinement la dimension des violences sexistes et sexuelles dans ses analyses.
Des actions concrètes pour prévenir les violences sexistes et sexuelles
Sextant Expertise propose plusieurs actions prioritaires pour les entreprises :
- Organiser des campagnes de prévention et des actions de sensibilisation.
- Former l’encadrement pour détecter et gérer les situations à risque.
- Réaliser un état des lieux des risques liés aux VSS.
- Intégrer les problématiques de sexisme dans les discussions sociales (consultations, négociations, informations).
- Renforcer les moyens des référents harcèlement pour leur permettre d’accomplir pleinement leur mission.
Une mobilisation collective indispensable
À l’occasion de cette Journée, employeurs, IRP et salariés doivent redoubler d’efforts pour éliminer les violences sexistes et sexuelles. En prenant des mesures concrètes, ils contribuent à créer des environnements de travail plus sûrs et plus inclusifs. La lutte contre ces violences est une responsabilité partagée, mais essentielle pour construire un avenir professionnel équitable.